Il avait abandonné les autres, il avait abandonné le groupe. Certains étaient toujours dehors, à discuter du sort réservé à la défunte, d'autres étaient rentrés, de guerre lasse. Quant à lui, sans opinion aucune, il avait réussi à se frayer un chemin dans le décor glauque qu'offrait ce fort abandonné. La personne qui avait mis en place cette partie du Rabbit Doubt avait soigné les détails et l'ambiance. L'atmosphère était lourde, pesante. L'image du cadavre ne quittait plus son esprit tandis que le bruit de ses pas sur le carrelage raisonnait lourdement contre les parois dénudées des murs. Le lieu était angoissant, l'estomac de Petzi était serré et ses yeux cherchaient une faible lueur à laquelle se raccrocher tandis qu'il avançait, du moins, qu'il faisait de son mieux pour éviter les obstacles. Le fort avait été abandonné, ça se voyait, ça se sentait. Pire encore, l'endroit était inhabité depuis tellement longtemps que ce qu'il véhiculait n'avait rien de saint, au contraire. S'habituant doucement à la pénombre, il évoluait maintenant avec plus de simplicité. Son esprit, toujours envahi par les images de cette jeune femme morte, ne cessait de frapper contre ses tempes. L'avertissant d'un danger imminent. Les sens alertes, il tendait l'oreille. Il savait qu'il n'était pas seul, toute une floppée de candidats circulaient entre l'intérieur et l'extérieur, des bruits se faisaient entendre ça et là et si le simple fait de se savoir en compagnie d'autres gens étaient sensé le rassurer, cette fois-ci, ça avait l'effet inverse. Parmis les candidats, un tueur, il en était persuadé. Et son intuition lui avait déjà collé un visage dans la tête, du moins, le comportement étrange de cette personne l'avait fortement alarmée. Alors, de cette simple intuition naquit une terreur plus grande que jamais. Et si le tueur en question l'avait dans sa ligne de mire, et si cette soirée était la dernière dont il disposait ?

Au lieu de perdre mon temps à m'agiter autours du corps sans vie, je décidai, comme bon nombre de mes compagnons, de partir à l'exploration du domaine. Trouver quelque chose qui pourrait nous aider à se tirer de ce merdier. J'avais décidé de commencer par le bâtiment B, la plupart des gens étant restés au A, je préférais me retrouver seul. M'enfin je ne l'avais guère était longtemps, Billie ayant eu la même idée que moi. Ensemble nous avons visité les lieux, fouillés, à la recherche du moindre indice. Enfin ensemble...Plutôt moi tout seul, la demoiselle se trouvant être d'une inutilité profonde. Je la soupçonnais d'avoir une case en moins. Voilà pourquoi dès que j'ai pu, je lui ai fais faux bond. Ayant à peu près fait le tour du bat A – plutôt rapidement je devais l'avouer – je m’attaquai cette fois ci au principal, le A. La nuit était tombée depuis bien longtemps, rendant l'ambiance plus lugubre encore. Heureusement j'avais réussi à me dégoter une lampe de poche qui fonctionnait toujours. Mais aussi une bar de fer, qui ferait office d'arme en cas d'attaque. Alors que je me trouvai au rez de chaussée, j'entendis du bruit. A tous les coups, je n'étais pas seul. Tous mes sens aux aguets, je levai mon arme de fortune, afin de me mettre en position, dès fois où je devrais m'en servir.  « Montres toi mec, je sais que tu es là... » Mais où ? Je n'aimais pas vraiment jouer à cache cache. Je levai le faisceau de ma lampe et balayai la pièce très mal éclairée. Finalement, je tombai sur un mec à la trentaine d'années, dont le visage m'était inconnu. Je ne me rappelais pas l'avoir vu tout à l'heure avec le groupe. En même temps nous étions tellement nombreux que je n'avais pu remarquer tout le monde. Ou alors peut être n'en faisait il pas parti... Habituellement je n'étais pas quelqu'un de parano, mais là, impossible de ne pas voir le mal partout. Je lui mettais la lumière en pleine tronche, de sorte que je devais l’aveugler. « T'es qui ? »

Encore sonné par la découverte de ce cadavre, la paranoïa s'était installée dans le groupe et, Petzi était prêt à parier sa chemise, petit à petit, le groupe se scinderait en plusieurs morceaux. Il y aurait les victimes potentielles, les suspects potentiels et les autres... Pour l'instant, il était bien trop tôt pour décider qui appartiendrait à quel groupe et pourquoi, mais le jeune thérapeute s'avait pertinemment que, à un moment ou à un autre, un second meurtre aurait lieu et une nouvelle victime y passerait. Si la première des victimes n'avait pas fait partie intégrante du groupe et si personne n'avait vraiment eu l'occasion de lui parler de son vivant, Petzi n'était pas duppe et se rendait bien compte que la prochaine victime serait l'un d'entre eux. Cette première attaque n'était qu'un signe, un présage, un avertissement. Quelqu'un allait s'amuser à leurs dépends, et ça, Petzi l'avait bien compris. Réaliste, il savait aussi que sa place n'était en rien gagnée et qu'il ne lui restait que peu de temps pour tenter de sauver sa peau. Qui était le loup ? Qui était l'auteur de ces crimes ? Même si quelques idées trotaient déjà dans son esprit, il tentait de se concentrer sur les faits et non sur ses intuitions. L'esprit ailleurs, il ne réalisait pas tout de suite que quelqu'un venait de le repérer, ce n'est que lorsque la lumière s'abatti sur lui que le jeune homme sursauta. Etouffant un cri, il fit volte-face pour tomber nez-à-nez avec l'un des autres participants, du moins, c'est ce qu'il espérait. Levant les mains en l'air en signe de paix, il tenta de s'expliquer. « Baisse ton arme, mec. Je suis pas un psychopate, sur la vie de ma mère. » Toujours les mains en l'air, dans une situation qu'il trouvait inconfortable, il continua sur le même ton. « Je suis Petzi, je suis arrivé en même temps que toi ici, j'ai découvert le corps de la première victime en même temps que toi et crois-moi... Je suis dans la même merde que toi, alors baisse ton arme. » lui suppliqua-t-il à nouveau. Dans des conditions pareilles, tout le monde craignait tout le monde, c'était logique. « C'est quoi ton prénom ? »

Le type que j'avais dans ma ligne de mire leva les mains en l'air, en signe de paix. « Baisse ton arme, mec. Je suis pas un psychopathe, sur la vie de ma mère. » C'est ce que pourrait dire un psychopathe non ? Et puis pour autant que je sache, sa mère pourrait très bien être morte, donc sa parole n'avait aucune valeur. Il tenta de me convaincre, me racontant qu'il était arrivé en même temps que moi, qu'il se trouvait dans la même merde. Je le sentais réellement mal à l'aise, et il m'avait l'air plutôt sincère. Je n'allais tout de même pas l'attaquer simplement parce qu'il avait eu le malheur de croiser ma route. Je baissais alors ma barre de fer, la gardant néanmoins en main, n'ayant pas l'intention de l'abandonner. J'éclairais ensuite le sol, arrêtant de l'aveugler. « Désolé...mais bon, on est jamais trop prudent. » D'ailleurs, tout cela ne signifiait pas que je lui faisais confiance. Monsieur pourrait très bien être un excellent menteur. Je comptais garder un œil sur tout le monde. Du coup, je doutais arriver à dormir la nuit. Je fus un instant tenté de lui donner un faux prénom, mais finalement à quoi bon ? Et puis surtout j'avais déjà donné mon vrai prénom aux autres, alors ça ne ferait que m'attirer les suspicions si il venait à découvrir que je lui avais raconté des conneries. « Keelan. » Je m'approchai de lui, afin de pouvoir mieux communiquer, on allait pas rester chacun dans un bout de la pièce.  « Tu as trouver quelque chose d'utile ? »

Right, le mec baissa sa lampe et son arme, tant mieux. Petzi soupira de soulagement, non pas qu'il ait pu être complètement affolé mais un homme avec une barre de fer dans les mains était bien plus dangereux qu'un mec qui n'avait que sa fureur de vivre comme défense. Néanmoins, il n'en voulu pas une seule seconde à Keelan, après tout, tous étaient des suspects potentiels et c'était une affaire compliquée que d'imaginer pouvoir, après seulement quelques heures passées au Fort, découvrir l'identité du tueur. Ainsi, tous étaient sur leur garde et tous se méfiaient de tous. Situation plus ou moins rocambolesque et assez lourde à supporter mais Petzi tentait de garder les pieds sur terre. Si l'assassin avait voulu l'attaquer, il ne l'aurait pas fait avec une lampe et encore moins avec une barre de fer. A moins qu'il ne cherche juste à éloigner tous soupçons de lui, et à agir en parfait innocence aussi inconscient qu'il pouvait être ! Arquant un sourcil, Petzi prit alors le temps d'observer et de dévisager son interlocuteur. Keelan lui dit juste être prudent, Petzi pouvait facilement le comprendre. « T'inquiète gars', je t'en veux pas, je comprends. » Il sourit doucement, faiblement. Si Keelan faisait attention à chacun des gestes ou du comportement de Petzi, il ne tarderait pas à comprendre que lorsque le jeune thérapeute était légèrement angoissé ou stressé, il avait tendance à parler comme un adolescent de quinze ans. Ce dernier lui donna alors son prénom, et même si Petzi se doutait bien qu'il puisse lui mentir à ce sujet, il ne pensait pas l'assassin suffisamment bête pour le faire. D'autant plus que tous s'étaient présentés quelques heures auparavant et qu'à présent, il fallait se tenir à ce qu'ils avaient déjà déclaré plus tôt. Sans vouloir jouer les surdoués, Petzi avait une mémoire en or et de ce fait, il avait pu retenir certains des prénoms qu'il avait entendu, à son arrivée au fort, à tout hasard. Puis Keelan se rapprocha, sans avoir aucun mouvement de recul, Petzi ne le quitta pas des yeux. Les muscles crispés, il ne s'attendait pas à devoir se battre mais bon, dans ce genre de situation, la prudence était mère de sûreté. « Rien que de la poussière. C'est le néant total et le pire dans tout ça, c'est que j'essayerais de dormir que j'y arriverais même pas. » se contenta-t-il de lui répondre en souriant, brièvement. Pas forcément à son aise dans des conditions de la sorte, il tentait néanmoins de garder contenance et de se montrer le plus "fort" possible. « Et toi, tu as dégoté quelques indices ? »