Maureen qui aurait jurée ne jamais foutre un pied dans ce fort se trouvait maintenant devant la large porte d’entrée. Elle n’allait tout de même pas rester dehors toute la nuit, c’était inenvisageable, un coyote allait surement la prendre pour appât ou bien un autre fou viendrait lui mettre des clous dans ses mains et pieds. Un relent lui donna envie de vomir, peut-être que le corps de la pauvre fille se trouvait près d’elle. Putain, fallait qu’elle dégage d’ici. Finalement, elle ne prit pas la porte d’entrée, mais celle du garage ou un truc comme ça. Il faisait sombre là-dedans, ce n’était pas vraiment rassurant. Il devait sous doute y avoir un interrupteur mais de nuit, impossible à trouver. En revanche, une lumière extérieure éclairait une partie du garage. Il y avait quelqu’un, là, assis. Les chaussures à talons de Maureen ne passaient pas inaperçues, si bien qu’elles claquèrent jusqu’à la guider vers le garçon qu’elle n’avait jamais vu. Elle avait du mal à reconnaitre tous ces geeks, fallait l’excuser. La demoiselle se pencha vers lui, avant de finalement s’asseoir en face de lui. Il lui fallait juste de la compagnie. Pour le moment en tout cas. Tant qu’il n’essayait pas de la tuer ou de la violer, ça lui allait, même s’il s’agissait d’un geek ou d’un drogué, elle ferait avec. « Ca craint. » Dit-elle finalement. Ce fut tout ce qu’il lui venait en tête et c’était déjà bien assez.

Une voix vint alors tinter jusqu'aux pavillons du new-yorkais. L'espace d'un instant, il resta figé, toujours dans une position de fœtus, sa tête plongée entre ses deux genoux et ses mains enroulées autour de ses jambes. Au final, il avait peur sans avoir réellement peur et s'était tout de même attendu à voir arriver, à un moment ou à un autre, quelqu'un à ses côtés. Et ça avait du bon puisqu'au final, le garçon avait toujours détesté la solitude, il se voyait donc plutôt rassuré. Cette personne - il ne savait d'ailleurs pas encore exactement où elle était vis-à-vis de lui - devait peut-être l'avoir suivit ... Peut-être que dans un élan de générosité ou ... non, elle avait simplement été attiré par sa normalité, lui au moins n'était ni un geek, ni un dépressif aux tendances suicidaire ... Enfin, c'était le mec lambda par excellence, quoi ... Peut-être un intrus parmi ces gens zarbis. Mais au fond, Zeke tolérait entièrement qu'on soit différent de lui, il admirait même parfois la différence de certains individus. Le jeune homme leva alors la tête vers cette fille. Cette femme, peut-être ? Soit, il n'en savait rien et pour ne pas la vexer, il ne dirait rien, il serait juste impassible. Du moins il l'aurait voulu mais il eut une moue davantage accueillante et chaleureuse. C'était sa nature, il était né comme ça, au fond. Qu'avait-elle dit ? Ça avait été emporté dans ses songes, et merde, il allait être obligé de répondre à côté de la plaque ! Quoique, il lui restait la simple issue de ne pas répondre ... « Une blague de mes potes, tu parles ! » A nouveau, son esprit et sa spontanéité avaient pris le pas sur ses réelles envies. Rester silencieux aurait été contradictoire avec sa réelle personnalité. Quoique, il n'avait aucune personnalité du coup, ce songe n'avait à son tour pas le moindre sens. Bref. « J'ai pris ça à la rigolade et voilà que je me retrouve dans ... dans un merdier pareil ! » Sa tête pivota alors légèrement alors qu'une vague touffe ébouriffée se dressait sur sa tete, ses yeux inspectèrent l'endroit sans vraiment l'inspecter pour autant. Il était perdu !

Maureen était épuisée. C’en était trop pour elle et pourtant, elle ne comptait pas dormir, quitte à se scotcher les paupières histoire de rester éveillée. Bon, peut-être pas. Mais pas de loin. En attendant, elle était dans l’obscurité, assise par terre – le ménage n’avait pas du être fait depuis une éternité, génial pour Halloween, un peu moins bien si on a peur de la moindre bêbête. D’ailleurs, Maureen préférait ranger ses mains sous sa veste, histoire de ne pas toucher quelque chose qu’elle pourrait regretter. Comme un clou pointu, une jambe découpée en morceaux ou pire, une araignée. Le garçon se rendit enfin compte de sa présence, il était temps. Il parla alors d’une blague de ces potes. Quoi ? C’était un de ces potes le mec qui avait tuer cette fille, mon dieu, elle était dans une pièce, seule avec le pote d’un fou. Il était peut-être fou lui aussi, c’était lui le loup, le malade, le cinglé. Maureen resta étonnement calme, il ne fallait pas qu’il sache qu’elle savait que c’était lui le malade, dans tous les films policiers on disait qu’il fallait que le meurtrier ne se doute de rien. Sauf qu’à chaque fois il s’en rendait compte et tentait de tuer la pauvre et innocente belle femme. C’était la description de Maureen ça ! Heureusement pour le cerveau de l’américaine, le garçon se remit à parler. Ah, non, c’était pas ce qu’elle avait cru. Lui aussi se retrouvait coincé. Elle en fut presque rassurée. Le jeune homme allait-il se mettre à pleurer ? Elle ne survivrait pas à une crise d’angoisse, ça non ! Fallait qu’il se ressaisisse ! « Mais t’inquièèèèètes ! Attends, c’est peut-être pas ce qu’on croit. C’est surement euuh… Un projet du FBI, pour voir comment des jeunes geeks réagissent à tout ça, tu sais, quand leur jeu devient vrai et compagnie. Enfin ouais, si ça se trouve y a des caméras et t’as l’air d’un con à pleurnicher alors que tes potes se tapent des barres en te regardant ! » D’accord, elle ne croyait pas du tout à ce genre de conneries mais qu’importe. D’ailleurs, lui non plus ne devait pas y croire. Elle se mit ensuite à rire. « Ou alors on va tous crever les uns après les autres. » Le rire s’emparait d’elle. C’était sa façon à elle de décompresser.

Elle voulait être rassurante ? Ça ne fonctionnait absolument pas. Pas avec Zeke tout du moins, il n'était pas de ceux qui rigolaient avec ce genre de choses ... Quoique. Si en fait mais là, les conditions étaient défavorables à ce qu'il se décide à rire de quoi que ce soit. Et pourtant, généralement, ce n'était pas l'humour qui lui manquait, au contraire. Mais là, la situation et tous les évènement qui s'étaient produits préalablement n'était propice à aucun humour, aucune tranche de rire du point de vue du new-yorkais. Il avait juste envie de pousser une gueulante et d'exploser ces p*tains de grilles qui le gardait en captivité et ça, ç'aurait simplement été la réaction du mec normal qu'il avouait clairement être depuis toujours et il ne voyait pas l'intérêt d'en changer. « Non, mes potes de sont ni psychopathes, ni sociopathes. » Il eut une petite moue puis se reprit, reprenant son sérieux, c'était déplacé. « Mes potes me manquent déjà, justement, une partie de Rabbit Doubt sans eux, qu'est-ce que c'est, au fond ? » Il baissa les yeux. Ce ne serait simplement pas une partie de Rabbit Doubt comme les autres, comme celles auxquelles il aimait participer avec eux. Après une bonne demi-minute de réflexion, le new-yorkais crut bon de faire une rectification suite aux paroles de son interlocutrice. « Puis pour info, je ne suis absolument pas un geek ! Du tout ! » Il écarquilla un sourcil avant d'être à nouveau rattrapé par sa réelle nature et accorder un sourire amical à la jeune femme qui lui faisait face et de laquelle il ne connaissait absolument rien à part le visage. La dernière phrase qu'elle avait dite, faisait froid dans le dos, d'autant plus que cela pouvait s'avérer être quelque chose de plausible au final. Quoique ... Zeke s'était convaincu que se cadavre était simplement un mannequin maquillé par un très bon artiste, juste pour leur faire peur. C'est pourquoi, il n'embraya pas davantage sur se sujet, préférant ne rien dire puisqu'au fond, c'était juste un mannequin, un simple mannequin. Réaliste tout de même. Pour écarter ce songe de son esprit, il renchérit, fixant la jeune femme. « Je suis Zeke. »

D’accord, c’était donc une mauvaise blague qui n’avait pas fait rire ce gars là. Dommage. Espérons que quelqu’un d’autre soit réceptif à l’humour de Maureen, histoire qu’elle ne devienne pas l’une de ces pimbêches sans humour qui riaient comme des hyènes. Bref. Il crut bon d’ajouter que ces potes n’étaient ni des psychopathes, ni des sociopathes. Je devrais refiler quelques pote à moi, dans ce cas se disait-elle. Maureen avait quelques amis douteux, enfin bref, c’était des gentils psychopathes, pas du genre à tuer une fille et à la crucifier. Le garçon réfléchissait apparemment à haute voix, lançant même quelques questions rhétoriques parce qu’honnêtement, une partie de RD sans ses potes à lui, il est évident qu’elle ne savait pas ce que c’était non plus. Bref, elle préféra hocher la tête, l’air de dire T’as raison, mec. Maureen fut informé qu’il n’était pas un geek, ah ouais ? Ca ne se voyait pas au premier coup d’œil, alors. « C’était pas une insulte. » Précisa-t-elle tout de même. L’espace d’un instant, ce fut le silence. Maureen se voyait déjà en train de se tourner les pouces ou autre, attendant un sujet de discussion mais finalement Zeke se présenta. « Maureen. » Ouais, ouais, ouais. Pas vraiment emballée, elle préféra faire une précision. « C’était une blague hein, je ne pense pas qu’on va mourir ou un truc comme ça. Ce serait complètement stupide… » Le plus stupide, ce serait de mourir ici et de voir l’autre timbrée vouloir disséquer le corps de Maureen puis l’enterrer en chantant Dieu. Ca, évidemment, elle ne préféra pas en parler en Zeke, il n’avait pas l’air d’humeur à parler de mort. Pourtant, ça n’a jamais tué personne d’en parler. Pas encore, du moins. Maureen observa ses ongles un instant avant de passer une de ses mains dans ses cheveux, histoire qu’ils soient impeccables. Ils l’étaient, comme d’habitude. « On se fait chier, ici, quand même. » C’était un fait, elle s’ennuyait. Après un léger sourire, elle reprit. « Enfin, t’y es pour rien, hein. »