» no, we can't (01/11_7h04)

no, we can't
01/11. 7h04
featuring Gandja.

« Je vais me tirer d’ici, je vais me tirer d’ici, je veux me tirer d’ici… » se répétait-elle incessamment. Agathe avait passé une horrible nuit, pire que tout ce qu’elle avait pu imaginer. Et, comme beaucoup, elle commençait à se demander ce qu’elle était venue faire ici. Agathe adorait Rabbit Doubt et maintenant il le lui rendait. Aux aurores, la belle se leva et décida de trouver un way-out. Tout ici lui faisait froid dans le dos bien qu’au départ la demoiselle pensait que c’était une grosse mascarade mais elle commençait à remettre cette certitude en doute. Et, quand bien même ce n’en était pas une et que l’organisateur de tout ceci se manifesterait bientôt, elle ne comptait pas attendre jusque là. L’idée de terminer comme la fille d’hier, très peu pour elle. Ainsi, elle s’aventura dans la base militaire désaffectée, Agathe en arriva même à marcher dans le désert ce qui la fit rire aux éclats, alors qu’au fond elle bouillonnait, elle voulait chialer tant tout ceci était dérisoire, tant tout ceci la dépassait complètement. Un désert, franchement. Cependant, sa jauge d’espoir remonta en flèche lorsqu’elle aperçut une porte. Une porte vers laquelle, elle se précipita. Sans aucune difficulté, la brune ouvrit la porte et avança. Malgré la facilité de la chose, elle croyait qu’elle avait trouvé un moyen de sortir. Il faisait sombre, trop sombre, mais elle s’en fichait complètement. (…)
« Ne t’égosille pas, c’est inutile » lâcha la brune quelque peu cassante, assise au sol contre un mur, après avoir entendu une voix masculine commencer à jurer, s’énerver et même paniquer. « J’ai déjà fait, ca n’a servi à rien » précisa-t-elle en lâchant un soupire saccadé, qui laissait plus ou moins transparaitre sa peur.

Ça me casse les couilles d'être ici, ça me casse les couilles d'être ici, ça me casse les couilles d'être ici, ça me casse les couilles d'être ici. [...] ça me casse les couilles d'être ici, ça me casse les couilles d'être ici. Je vais finir par moi-même me rendre ouf à me répéter inlassablement ce foutu refrain dans ma tête. Dans les dortoirs, je suis allongé sur le lit que j'ai jugé mien et mon beats sur les oreilles, je me coupe du monde, de ce putain de monde de merde dans lequel on est, pour me façonner le mien, celui que j'ai quitté en choisissant de venir ici, harlem quoi. Les autres dorment tous encore (du moins ceux assez cons pour pouvoir dormir dans de telles conditions), pour ma part, j'ai pas fermé l’œil de la nuit, mes yeux sont explosé et j'ai une foutue impression de m'être tizzé deux bouteilles de Jack. Et je parle en connaissance de cause. Malgré la musique assourdissante, je réussis à entendre un pauvre type ronfler comme un tamanoir. Je me redresse du lit et lance un regard assassin au concerné. J'ai envie de montrer les crocs mais je me retiens. Mes pieds se posent à terre. Je prends les choses en main.
Pourquoi il fait aussi noir dans ce foutu souterrain, peuvent pas mettre des lanternes ou des chandeliers s'ils sont si radins que ça? Je suis peut-être trop optimiste en disant cela, mais peut-être est-ce une porte vers la sortie que je nous trouve ici. De la poche arrière de mon jean, je sors mon zippo et en profite pour me griller une clope. Je me sers du briquet comme d'une lampe torche (après tout on fait avec les moyens du bord) et progresse dans le sombre "couloir". J'me les gèle. J'en peux plus, je vais devenir malade. Je continue ma route. Ça commence à puer la moiteur et le mal séché, j'ai un haut le corps; ça me dégoute. Je pédale dans la semoule là, il est sans fin ce putain de souterrain.
Ça fait au moins 15 minutes que je marche et j'ai l'impression d'être toujours au même endroit. Je tourne, prends des chemins différents; je vais trouver le moyen de me perdre et de mourir de faim au lieu de me faire déchiqueter comme il le faut, comme les autres à l'extérieur. « Bordel de merde! » Je me rallume une clope et tape du pied dans un mur. J'ai mal. Je jure. « SA MÈRE LA PUTE! » J'ai pas le temps de me lamenter plus, une voix s'élève de la pénombre, me faisant sursauter au passage. « Ne t’égosille pas, c’est inutile » Je me retourne, une fille est assise comme une pauvre enfant contre un mur, elle a l'air d'une biafrée. Elle me dit quelque chose mais je me suis pas attardée sur son cas. « J’ai déjà fait, ça n’a servi à rien » Je hausse les sourcils. « Je cris pas pour qu'on m'entende et qu'on sorte d'ici. Je cris parce que j'en peux plus et que je viens de me niquer le pied. » Je tire une taffe de ma cigarette. « On a eu la même idée de merde et je suis sûr à 1000% qu'on est perdus. »

« J’parlais pas non plus du fait de crier pour qu’on t’entende ou m’entende. J’préfère encore crever dans ce souterrain que d’attendre que ces cinglés viennent me sauver.. surtout si c'est pour après m'autopsier » répondit-elle d’une voix monocorde avant de reporter son attention sur le mur. A force ses yeux s’étaient habitués à l’obscurité et Agathe parvenait à voir les contour de sa silhouette. Et, oui elle faisait référence à la scène d’hier soir. Agathe était une professionnelle dans les domaines qui relevaient du sarcasme, de la moquerie, ou encore dans le fait de râler. Surtout râler, mais soit. Puis, tout comme lui venait de l’expliquer, et si elle était assise comme une recluse désespérée au bord du suicide c’était bien parce qu’elle s’était tapée le pied contre la roche également, certainement pas pour la beauté du paysage. Malheureusement, elle n’était pas munie d’une vision infrarouge. La voix masculine fit ensuite une réflexion sur le fait qu’ils étaient perdus. Agathe échappa un rire jaune. Si ce n’était qu’à 1000%… « Fallait pas avoir inventé l’eau chaude ou le fil à couper le beurre pour le trouver ca » fit-elle d’un ton sarcastique, empreint de cynisme presque blasé. Quelle perspicacité. Non, elle ne se voulait pas désagréable mais tout absolument tout la poussait à l’être. Si au moins on lui avait envoyé le petit poucet..mais non, c’était un parfait inconnu qui comme elle avait eu une idée dès plus merdique. « Ca fait une heure voire peut être deux ou trois que j’suis dans ce trou.. » ajouta-t-elle à titre d’exemple. Si depuis le temps, elle n’avait pas compris qu’elle était paumée.. « J’veux juste me barrer putain, c’est si compliqué que ca à comprendre, bordel de merde… » lâcha-t-elle ensuite en soupirant, posant sa tête contre le mur en fermant les yeux. Même pas 24h qu’elle était là, et elle sentait qu’elle craquait. Et, cette putain d’envie d’hurler qu’elle retenait commençait à vouloir exploser. On se serait cru dans un film: deux protagonistes pris au piège n'ayant aucune sortie de secours. Allait bientôt commencer la séquence lamentation suivie de celle sur les révélations. Super.

Je m'abaisse pour toucher mon pied, mais me relève car la meuf m'a répondu. Elle est désagréable et j'ai simplement envie de lui dire d'aller se faire foutre tant sa condescendance me fait monter les nerfs. Mais je me dis qu'en me faisant des ennemis, c'est moi qu'on verra empalé sur une stalagmite au petit matin. Même si la mort ne m’effraie pas et que mon âme a déjà été vendue au diable depuis bien longtemps, je préfère pas m'attirer les ennuis, du moins pour le moment. Je souffle et j'ignore ses remarques. Elle se lamente et essayerait presque de mettre la larme à l’œil. J'en ai oublié mon pied qui ne semble plus souffrir à ce moment. Je tire une nouvelle taffe de la clope et m'avance vers elle lui tendant mon paquet ouvert, l'incitant à en prendre une. Elle l'accepte, la cale entre ses lèvres et la flamme de mon briquet vient lécher la fraise de sa garrot. « J'te propose un truc. Je pose mon cul à côté de toi et on attend qu'on vienne nous chercher. » Je sais très bien qu'elle va refuser. « Au fait, moi c'est Hodgy. »

La demoiselle l’entendit souffler mais pas répondre. Dommage, elle aurait bien voulu extérioriser. Soit. Agathe prendrait son mal en patience. Tout lui faisait chier ici, et maintenant plus que jamais. Les événements c’étaient enchainés sans ordre logique et son cerveau ne voulait pas actualiser. Le gars s’approcha d’elle, lui tendant son paquet de clope. Au point, où elle en était, il n’était plus nécessaire qu’elle fasse du zèle sur sa consommation de nicotine. Ainsi, la Danoise en attrapa une et la cala entre ses fines lèvres avant d’en tirer une large, grande bouffée une fois celle-ci allumée. « Merci » fit-elle en expirant la fumée et elle esquissa un sourire. Oui voilà, c’était peut être ca qui lui fallait: augmenter son taux de nicotine afin que sa jauge de mauvaise humeur ne descende. « Si tu veux mon avis, on va devoir compter que sur nous même, mais comme tu veux » répondit-elle d’un ton désintéressé en tirant sur sa clope une nouvelle fois. « Mais j’suis pas contre le fait d’espérer que le Saint-Esprit ait pitié de nous au point de nous envoyer quelqu’un » fit-elle sur le ton de la plaisanterie. C’était aussi et surtout sa flemme qui parlait. La brune avait tourné des heures entières sans trouver la sortie alors pourquoi maintenant ca changerait. Défaitiste ? Totalement. Après quoi le jeune homme se présenta. Agathe échappa un petit rire en entendant son prénom. « Tes parents étaient défoncés quand t’es né ou comment ca se passe ? » rétorqua-t-elle, plaisantant évidement, ce qu’elle fit remarquer en vrillant ses prunelles vers les siennes affichant un large sourire mutin. « Moi, c’est Agathe. »

« T'sais quoi, appelle moi Gandja. » Je me pose à côté d'elle en soupirant. Le bandit de NY fait moins le malin dans les souterrains d'une base militaire désaffectée, prêt à crever à se faire hagal à tout moment. Je suis sé-bla de cette situation de merde dans laquelle je me suis foutu. Quel idée de merde, j'ai eu de venir ici. C'est énorme qu'il y ait des gens assez qués-ni pour vouloir nous «emprisonner». (parce que c'est ce que je suis en ce moment, un foutu loup en cage et j'en peux plus, je vais sûrement péter dans les heures qui viennent si y'a pas un autre événement qui vient chambouler le truc) Ils veulent quoi qu'on s'entretue et qu'on commence à se bouffer les uns les autres? Parce que parti comme c'est, le premier waak qui me regarde de travers je le bâfre. L'enfermement ça me fait monter les nerfs et je fume déjà de la tête. Je me retourne vers la gadji et la regarde quelques instants, sans qu'elle remarque trop que je la matte. Elle est plutôt bonne dans son genre; beau cul, belle gueule. C'est pas comme les dizaines de crevettes avec lesquelles on est enfermé, où chez elles, la tête est bonne à jeter. « C'est ouf quand même. Y'a vraiment un pauvre type qui tient à nous enfermer? Il s'attend à quoi, que ça finisse en bain de sang? Ou en partouze? » Un ange passe. « Enfin à l'allure ou vont les choses, je m'étonnerai pas si ce soir, ça commençait à partir en couille. »

Agathe eut un sourire en coin. Elle ne saisissait pas tellement le rapport entre Hodgy et maintenant Gandja mais soit. Qu‘est-ce que ca changerait de le savoir au final ? Rien. « Si ca peut te faire plaisir » répondit-elle en esquissant un nouveau sourire. La brune se détendait quelque peu, comme ca avoir de la compagnie ca avait un effet non négligeable. Cependant, ils étaient toujours coincés sous terre. Idée qu’elle préférait chasser de son esprit pour éviter de lui faire subir une crise de panique. Agathe détestait les endroits clos c’était un fait mais c’était contrôlable, en revanche pour ce qui était d’être sous terre c’était une autre paire de manche. Elle ne supportait pas l’idée de savoir qu’il y’avait une énorme masse au dessus d’elle prêt à s’effondrer, à tout moment, sur elle et l’ensevelir. Néanmoins, son ’instinct de survie’ la poussait à être forte. Puis, le dénommé Gandja reprit la parole. « Va savoir.. » fit-elle pensive. Sa mère lui avait souvent dit que la Terre était peuplée de cinglés mais là ca dépassait tout. « On nous a souvent répété de ne pas faire confiance aux inconnus. Et, nous, comme des gros cons, on ne trouve rien de mieux à faire que de s’y jeter les yeux fermés. » renchérit-elle d'autant plus exacerbée, notamment par sa propre stupidité. Puis un silence s’installa, loin d’être gênant, pour elle du moins. Ensuite, la voix de Gandja s’éleva de nouveau. « J’espère qu’on sera présent pour pouvoir compter les points » dit-elle d’une voix emplie de sarcasme, un fin sourire étirant ses lèvres. Ouais, elle espérait ne pas passer la nuit dans ce trou à rat. « Ah, et te gêne surtout pas pour reluquer hein. » fit-en plantant ses prunelles azur dans les siennes, sonnant presque comme un reproche amusé néanmoins. Oui, la jeune femme l'avait remarqué, faut dire que quand celui qui mattait faisait tout pour ne pas être remarqué qu'il l'était justement. Soit. « après tout, c'est peut être la dernière fois que tu le peux.. » ajouta-t-elle, prenant la chose à la dérision, esquissant un fin sourire mutin avant que son regard ne balaie l'espèce de galerie où ils étaient tout les deux coincés. Personne ne savait combien de temps ils allaient encore pourrir ici.

Agathe m'avait grillé, comme un steak par ailleurs. « Je suis qu'un homme. » Dis-je en plantant mon regard dans le mur qui nous fait face, histoire de rattraper le tire. C'était poisseux, moite et nos voix s'étouffaient à peine sorties de notre bouche, une impression étrange et désagréable. « Enfin, tu peux que te sentir flattée. Franchement? » Je m'étais retourné vers elle en disant ça. C'était plus à prendre à la marade qu'à autre chose et une chose était sûre, ici, il valait mieux rire que de se lamenter sur notre foutu sort; sinon on avait clairement pas fini. Je les vois les autres piafs à pleurer à longueur de temps au lieu de profiter du peu de temps qu'il nous reste. Je suis presque sûr qu'on va tous clamser les un après les autres. De faim, de chaud, de manque de sexe, d'une dépression, de manque de vie social. Bref, crever tout court comme des chiens galeux.
Pris d'un excès de folie, je me lève brusquement. J'ai pas envie de me dessécher ici. Je me plante devant elle, qui me regarde avec un air moitié interloqué, moitié surpris. « Bon meuf, finalement j'ai pas la foi d'attendre. On bouge, on che-cher et on verra bien si on sort un jour d'ici. Au pire, t'es en bonne compagnie tu vois? » Je lui tends une main pour l'aider à se relever. Qu'elle accepte ou non, je me tire, même si bien entendu, je préfère être accompagné. Et quelle compagnie.

Le rire cristallin d’Agathe retentit dans la galerie lorsque le jeune homme expliqua qu’il n’était qu’un homme. « Pardonné » annonça-t-elle tout sourire, bien qu’elle ne lui en voulait pas, elle n’allait pas lui arracher les yeux sous prétexte qu’il la regardait. Soit. Puis, celui-ci ajouta qu’elle pouvait se sentir flattée plutôt que l‘inverse. Certes, Agathe haussa les épaules distraitement. « Si tu le dis » répondit-elle ensuite, vrillant son regard vers celui du jeune homme, affichant un nouveau sourire empreint de malice. Après quoi, elle détourna brusquement la tête pour éternuer. « Pxtain, si j’choppe la crève.. » s’énerva-t-elle sans finir sa phrase, les fins traits de son visage se durcissant. Il ne manquait plus que cela, qu’elle attrape la crève ici, ce serait comme signé son arrêt de mort car personne ne lui viendrait en aide. Bref. Agathe remarqua que Gandja avait sauté sur ses pieds. Quoi ? Il avait peur d’être contaminé ? Ce n’était qu’un éternuement, surement dû à la poussière. Mais, la brune compris que la réelle raison était qu’il ne voulait pas croupir ici. « Je te l’avais dis qu’il ne faudrait compter que sur nous même si on désirait revoir la lumière du jour. » fit-elle simplement en prenant sa main pour se relever. « Je te suis. » annonça-t-elle en époussetant ses vêtements alors qu’il ajoutait qu’elle était, au pire, en bonne compagnie. La belle se redressa pour lui faire face, plantant ses prunelles dans les siennes. « C’est encore à moi d’en décider.. » répondit-elle joueuse, légèrement enjôleuse, avant de casser délibérément la chose en lançant. « Au pire, c’est pas comme si j’avais le choix ! » Taquine, lui lançant un clin d’œil complice. Ne pas se laisser abattre, c’était son crédo du moment. Après quoi, elle aligna plusieurs pas pour marcher tout droit. « Bon. Tu viens » lança-t-elle en pivotant sur les talons, ses cheveux virevoltant dans son sillage, vers le jeune homme qui n’avait pas encore bougé.