Il y avait eu cette porte entre-ouverte. Quasiment fermée, donc. Maureen n’y avait pas fait attention jusque là, il faut dire que personne ne lui avait proposé de lui faire le tour du proprio la veille. Elle y remédiait donc par elle-même aujourd’hui. Rien n’y faisait, elle n’arrivait pas à oublier que ce soir, on désignerait une nouvelle fois le loup, que cette fois, les autres pourraient décider de la tuer, comme ce qu’il s’était passé pour Billie qui finalement, était innocente. Tout comme Maureen, tous comme la vingtaine de personnes présentes avec elle, sauf un. Putain. Mauren se retrouvait elle-ne-savait-où, mais elle continuait de marcher, il y avait bien une sortie. C’était sombre, c’était sans doute sale aussi, génial. Malgré la saleté, quelques instants plus tard, l’américaine se trouvait à terre. Volontairement ou non, elle ne savait pas vraiment, mais elle était assise. Ses mains, aussi belles soient-elles avec du vernis, ne pouvaient contenir les larmes de celle qui n’en pouvait déjà plus. A peine vingt-quatre heures et c’était comme si elle avait du appuyer sur la gâchette d’un pistolet pour tuer quelqu’un à bout portant. Ils étaient tous responsables, mais ça ne l’aidait pas à aller mieux. Au lieu de hurler, cette fois-ci Maureen avait préféré se retrouver seule avec elle-même. C’était pitoyable de pleurer dans le noir. L’américaine tenta de reprendre son souffle habituel, de cesser de pleurer comme la gamine qu’elle ne pensait plus être. Il fallait qu’elle dégage d’ici au plus vite. Vivante, cela allait de soit. Dégage de ce souterrain et ensuite de ce lieu. Ouais, c’est ce qu’elle allait faire. Dans un instant, quand elle aurait le courage de se relever, de garder la tête haute et d’emmerder tout ce qui trouvait à ses côtés, comme à son habitude.

Le poids qu'il portait sur ses épaules était trop lourd, c'était l'évidence même. Un thérapeute, aussi doué soit-il, ne pouvait pas calmer les maux qui rongeaient une personne s'étant rendue coupable d'un meurtre, même involontaire. L'image de cette jeune fille innocente, pendue, par leur faute, par sa faute... c'était trop lourd à porter, trop difficile à supporter. Il savait pourtant qu'il n'était pas seul responsable de ce dessein macabre, il savait aussi que c'était l'une des règles les plus horribles de ce jeu auquel, volontairement, il avait décidé de participer. Mais aujourd'hui, deuxième jour de l'aventure seulement, il se sentait faiblir, il se sentait partir en vrille. Il fallait qu'ils mettent la main sur le véritable coupable, il fallait qu'ils trouvent le loup et qu'ils le tuent, des innocents continueraient de souffrir, sinon. Alors, partagé entre culpabilité, remords, et furieuse envie de mettre un terme à ce supplice, Petzi tentait de rester stable. Chose difficile lorsqu'on savait consciemment qu'on évoluait dans un univers instable et troublant. Il y avait parmi ses camarades de jeu, un coupable, un responsable. Quelqu'un qui commettait des meurtres de sang froid et qui se réjouissait de voir le reste de la meute accuser des innocents à sa place. Quelqu'un qui prenait son pied à les regarder tuer une tierce personne à sa place, avant d'en exécuter une autre. C'était glauque, c'était horrible. Et ce ne fut qu'à cet instant précis que Petzi réalisa combien ce jeu était malsaint. Lui qui, pourtant, avait toujours adoré y jouer sur le NET, réalisait enfin combien cette situation, en live, pouvait être éprouvante et sensiblement pesante. Des indices, il en avait déjà quelques uns en sa possession, assez fier de son résultat même si la veille, il avait contribué à l'assassinat d'une innocente. Il savait qu'il se rapprochait d'une piste, il en était persuadé. Alors il se mit en quête d'autres indices, fouillant des pièces qu'il n'avait encore jamais visitées. C'est ainsi qu'il ouvrit une porte, qu'il se retrouva dans des souterrains et que sa route croisa celle d'une âme toute aussi peinée que la sienne, celle de Maureen. Doucement, il entendit des sanglots, calmement, il se rapprocha de la source de ce bruit jusqu'à découvrir, dans la pénombre, une jeune femme, assise, sanglottant. Son esprit de thérapeute ne le quittant guère, il s'assit près d'elle en lui adressant un sourire qui se voulait réconfortant. « Est-ce que ça va ? » La question était bête, utopique, mais il fallait bien entamer la conversation... quelque part !

Maureen entendit un bruit. Etait-ce un rat ? Pitié, faites que ce ne soit pas un rat ! Pourquoi était-elle terrée ici de toute façon ? Pourquoi pleurait-elle comme une idiote… Elle savait toutes ces réponses mais très franchement, elle n’en avait cure. Le bruit s’intensifia. Un énorme rat, alors. Hurk, dégueulasse. Non, le bruit continuait de s’approcher et de faire plus de bruit. C’était forcément humain, ça. Elle pensa que c’était une bonne chose, avant de se raviser. L’américaine frotta ses paumes de mains moites –voir même mouillées- sur son jean avant de se frotter les yeux, histoire d’être présentable, ou surtout, de faire un peu moins pitié. Il lui demanda si ça allait. « T’es psy, toi, non ? » Dit-elle ironique face à cette question tout à fait stupide. A vrai dire, elle ne savait même pas qui était avec elle à cause de la pénombre, qu’importe, ce devait être un connard, comme beaucoup de monde ici. Sauf elle, évidemment. « Mes yeux ont du mal à supporter le noir et la poussière, d’où le… » Enfin bref, d’où ça quoi. Histoire de se justifier qu’elle ne se lamentait pas comme une imbécile. Bref. « T’as vu, c’est une sorte de… Souterrains. Etrange. » Se raclant la gorge, Maureen passa encore une fois une main sur son visage avant de finalement tourner la tête pour vraiment regarder le garçon. « Et donc toi, tu eeees… » Souffla-t-elle en laissant sa phrase en suspens, afin de recevoir une réponse. L’américaine ne comptait pas se lamenter davantage, surtout avec une personne présente, c’était… Dérangeant. Puis, ils étaient tous dans la même situation et jusqu’à preuve du contraire, lui, ne pleurait pas. Et puis dans le noir en plus, dans le genre plus con, on fait rarement pire. Elle regarda l’homme peut-être un instant de trop, non vraiment, elle ne savait pas son prénom. Il ne devait pas connaitre le sien non plus, ils étaient quittes.