Bordel, si seulement il y avait ici de l'alcool, du pur, de l'eau vie. De quoi se mettre la tête à l'envers, quitte à crever, au moins ne pas le voir venir ou l'accueillir avec le sourire du crétin bourré. La veille avait été la pire expérience de sa vie et cela ne faisait que commencer. Adosser contre un mur, il avait passer la nuit à somnoler, réveiller sans cesse par ses cauchemars, par des bruits étranges. Ou plutôt, disons que n'importe quel craquements devenait ici soudainement une menace possible. Il avait suffit de deux nuit et d'une journée ... Très peu pour foutre la merde dans une vie ... Et pourtant.

Le soleil se levait à peine, ses couleurs pâles et pastels juraient presque dans un tel environnement. C'était comme si le dehors se donnait un malin plaisir à les narguer, eux et leur fatal destin. Et afin de bien leur rappeller que même le rêve ne leur était pas authorisé, un cri lugubre et profond se fit entendre. Il résonna comme hyène dans le désert. Sympa le réveil. Aaron fut sur pied en quelques secondes, lui et quelques autres furent les premiers dans le désert, cette partie de terrain qui leur était accordé. Dans leur courses la poussière se souleva. En s'estompant rapidement, elle dévoila à la vue de tous, un nouveau cadavre : La pieuse gamine ! Elle était là au sol, sans vie, visiblement électrocutée. La fin n'était pas proche. Trois morts en trop peu de temps. L'instant n'était plus à la fébrilité. Droit comme un I face à ce nouveau spectacle morbide, Aaron senti la rage monter en lui peu à peu. Il murmura simplement : Ca ne fait que commencer ... Et on va tous crever. Les uns après les autres ... Sa voix était calme, posée. C'était juste un fait. Mis à part un miracle, leur engrenage était trop bien ficelé. Il n'y avait aucune raison pour que cela ne s'arrête avant la fin de cette partie in real life

Le regard fatigué, les cernes apparaissantes, les cheveux probablement en bataille et une minime barbe récente, l'image était presque poétique. Cet homme, premier sur les lieux du crime, l'allure tiraillée, le soleil levant sur un désert meurtrier et un corps à ses pieds. Il aurait presque pu l'écrire, le désirer pour un prochain film ou épisode. C'était glauque. Une jeune femme fit son apparition à ses côtés. Elle resta un instant silencieuse. Pas de cris, pas de vomissements. N'était-il pas le seul à être submergé par le tout et comme bloqué émotionnellement ? Le choc prenait son emprise, les boucliers se dressaient. Elle s'adressa alors à lui en se rapprochant légèrement. Avait-il vu quelque chose ? Il secoua la tête, le regard toujours posé sur la morte. Personne. Aussi vide qu'on ne peut se l'imaginer en plein désert. Il n'y avait qu'elle. Rien n'a bougé. Il n'y a peut-être que la mort qui s'est fait la malle entre temps ... Il détourna alors son regard de Campell pour la première fois et le posa sur son interlocutrice. Il hésita presque de peur de la souiller, comme si la vision du mal était contagieuse. Shauna c'est ça ?

On l'a tous entendu cette plainte, même de loin. Un cri plein de souffrances qui n'a même pas réussi à déchirer la toile de nuages noirs qui plane toujours au dessus de notre nouvelle prison. On se rend compte maintenant qu'on est tous des lapins en cage. Quand on se réfère au jeu, il y a un loup qui est censé tous nous tuer, mais on essaie de ne pas y penser, de ne pas y croire. Peut être que tout ça est juste un canular, tout le monde le dit ? Moi, j'pense pas. On va surement mourir. Ce qui est sûr, c'est qu'ils auraient au moins pu nous enfermer dans un endroit un peu plus beau et joyeux pour nos dernières heures. On va mourir. Et ça commence maintenant. Un hurlement féminin, comme dans les films d'horreur. Bordel, ça les fait bien rire de nous faire tous flipper, de nous faire tous hurler. Je suis alors les quelques personnes qui se dirigent avec hâte vers le cri. Juste pour voir. Est ce qu'il y a un mort ? Est ce que le loup a frappé ? Est ce qu'il est encore là ? Peut être que c'est inimaginable, mais à plusieurs, c'est probable qu'on arrive à le blesser, l'écorcher, faire au moins quelque chose. A l'origine du cri se trouve un groupe de personnes affolées, apeurées. Je m'approche avec curiosité. Une femme est à terre, elle est morte apparemment. Les questions fusent. Dans ma tête aussi. Peut être que le loup est cette femme devant moi, ou l'homme juste là. Je ne crois même pas au fil barbelés, c'est le loup, point. Étonnement, je n'ai aucune peine pour cette femme morte. Je suis heureux que ce n'est pas moi. Et j'espère que la prochaine fois, ce ne sera pas moi non plus. Une femme, plus choquée que les autres soupçonne déjà l'un de nous. Mon regard reste sur la femme à terre. Putain, c'est dégueulasse. Je ne jamais vu autant de personnes mortes dans ma vie en si peu de temps. C'est pas forcément l'un de nous qui l'a tuée, en fait. On est tous dans la crainte. Si ça se trouve, ce n'est que les barbelés. C'est peut être triste pour elle mais je me réjouis que ce n'est pas moi. Arrêtez, de toute façon on le pense tous. Je toussote et essaie de ne pas vomir à la pensée de ce qu'on a pu faire à cette femme, et ce qu'elle a pu ressentir.

Ils étaient deux, puis trois. Une voix féminine vint briser le bref échange qu'aaron partagea avec Shauna. Une voix tranchante, insolente. Aaron tourna légèrement la tête et jucha la frêle silhouette d'une gamine au long cheveux brun. Elle ne devait pas avoir bien plus de 20 ans. Ouais une gamine c'était bien ça ... qui d'autre pour avoir l'intelligence d'une telle réplique à cet instant précis ... Il haussa un sourcil et garda le silence. Il n'allait pas rentrer dans ce petit jeu. Elle avait besoin d'évacuer ? Parfait, elle en avait le droit. Lui avait celui de ne pas sauter sur l'occasion de faire gonfler la polémique. A l'image du regard inquisiteur que Shauna lui avait attribué, la petite brune demanda clairement qui avait fait cette macabre découverte en premier. Aaron reposa le regard sur le corps sans vie, il entre ouvrit la bouche pour parler lorsqu'une nouvelle interruption aux clairs airs d'accusation éclata. Il ne voulait même pas voir de qui cela venait ... Alors que le ton semblait déjà monter, il préféra couper court : C'est moi ! J'étais le premier. Je n'ai vu personne d'autres, rien ... Et au cas où vous auriez tous besoin de l'entendre : Non je ne l'ai pas tuée. Les crimes, je les écrits, je ne les commets pas. Il ne croyait pas si bien dire. Il avait bel et bien déjà été engagé dans une bagarre ou deux entre mecs mais au delà du simple coup de poing, jamais Aaron n'avait pu lever la main sur qui que se soit ... il n'écrasait même pas les araignées et Dieu sait qu'il les détestait !

Aaron reposa alors son attention sur sur sa première interlocutrice Shauna. Il voulu esquisser un bref sourire, comme il l'aurait fait dans n'importe quelle autre situation sociale, comme un réflexe, mais ce sourire ne vint jamais, ce n'était pas l'endroit, pas les circonstances, malheureusement. Il se contenta d'acquiescer à l'écoute de son prénom. Aaron oui, il s'appelait bien Aaron. Un prénom biblique. Quelle ironie. La jeune femme blonde à ses côtés qui semblait gardé son calme jusqu'ici, craqua légèrement. Elle avait raison ... ou pas. A nouveau, notre trentenaire fit entendre sa voix posément : Peu importe, nul ne saurait le dire. On peut toujours passer chacune des secondes qui passent à se laisser ronger par la paranoïa ou éventuellement essayer de mettre à profit le peu de temps qu'il nous reste. Si le moindre moyen de nous sortir de cet enfer se cache quelque part au sein de cette propriété c'est plutôt la dessus que nous devrions nous concentrer ....